mardi 29 mai 2007

Qu’est-ce qu’un site internet ???...

C’est la question sur laquelle un juge britannique répondant au nom de Peter Openshaw a avoué très sincèrement son incompétence !... L’incident s’est déroulé en plein procès relatif à trois prévenus accusés d’incitation à la commission d’actes terroristes sur internet. Face à des faits, peut-être dotés d’une technicité propre mais somme toute assez courants aujourd’hui, le juge Openshaw a déclaré : « Le problème c’est que je ne comprends pas les termes utilisés. Je ne cerne pas vraiment ce qu’est un site internet... ». Suite à cette confession du magistrat, le procès a été interrompu le temps qu’il consulte quelques experts pour de plus amples informations...
Depuis, le juge Openshaw est bien évidemment devenu la risée de certains médias et sans doute de quelques uns de ses collègues. Est-ce justifié ? Pas forcément... En premier lieu, il n’est possible de raisonner correctement en droit sans appréhender suffisamment en profondeur le sujet traité. L’étude de la jurisprudence permet de découvrir un nombre de cas impressionnants où certains juges, baignés dans la certitude de maîtriser un domaine, rendent des décisions au mieux à l’emporte pièce au pire complètement fantaisistes. En second lieu, il n’est peut-être pas si inutile de se poser enfin la question de savoir ce qu’est – juridiquement – un site internet ? Car avec l’ajout de cet adverbe, la question prend une coloration nouvelle et le juge Openshaw passe du statut de pauvre inculte à celui de magistrat ambitieux n’ayant pas peur de soulever des tabous juridiques... En effet, qui peut se vanter de définir parfaitement un site internet en droit positif ?
Personne à notre connaissance et sûrement pas la plupart des magistrats qui, sans aller jusqu’au déni de justice, ont parfois de la peine à cerner juridiquement le concept de site internet. Et pour cause ! Pour y parvenir il serait utile qu’il y ait qu’une seule définition pertinente. Or, cela n’est, semble-t-il, absolument pas le cas. Ainsi, si l’on se place successivement sous l’angle du droit commercial, du droit de la presse, du droit de la distribution ou encore du droit de la concurrence, un site internet se voit attribuer des définitions bien diverses, parfois même opposées. Les récentes affaires Google sont d’ailleurs les plus à même d’illustrer cette réalité. En effet, dans les différentes décisions, l’on sent un certain doute lorsqu’il s’agit de qualifier le service Adwords de régie publicitaire... qualification propre au monde réel dont l’application à un service de l’internet semble difficile à démontrer.
En définitive, il ne parait absolument pas incongru de s’interroger sur ce que recouvre techniquement un site internet pour choisir la définition juridique la plus pertinente au regard des faits soumis. En cela, ce juge – peut-être un peu trop sincère dans ses propos – mérite d’être félicité pour avoir essayé de comprendre avant de juger. N’est-ce pas pour cela qu’il a été investi de sa fonction ?

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